Tout au long des deux jours d’examen du projet de loi, les députés ont adopté 146 amendements sur les 491 déposés.
Si l’immense majorité de ces amendements adoptés sont des amendements formels du rapporteur Gilles Savary, amendements dits « rédactionnels », plusieurs amendements modifient tout de même de manière significative plusieurs aspects du projet de loi, notamment sur le renforcement du Régulateur (ARAF) ou le poids des Régions dans le système de transport ferroviaire national
L’orateur du groupe Radical Républicain Démocrate et Progressiste, Joël Giraud, député des Hautes-Alpes, a déposé et présenté 61 amendements dont une grande partie proposait des améliorations dans ce sens.
Quinze amendements du député ont été adoptés directement et environ trente amendements ont été satisfaits par l’adoption d’amendements similaires ou équivalents.
Les débats ont débuté avec le rappel des principaux objectifs de la réforme qui sont la réunification de la gestion de l’infrastructure et la préparation à l’ouverture à la concurrence pour le transport passager prévue pour 2019.
Il s’agit donc d’abord de construire un groupe SNCF fort « une Deutsche Bahn à la française » comme l’a rappelé Gilles Savary, rapporteur du texte.
Joël Giraud a rappelé qu’il fallait travailler à la recherche d’un compromis équilibré pour ne pas déstabiliser la SNCF tout en consolidant le modèle économique et financier du système ferroviaire aujourd’hui lourdement endetté (42 milliards d’euros de dette au total) et ne pas laisser de côté le fret. Il a aussi demandé que l’État joue son rôle d’a.o.t pour les trains d’équilibre du territoire.
Le député RRDP a également fait adopter un amendement soulignant l’importance de l’intermodalité, très absente du texte initial.
Dans un contexte de libéralisation progressive, Joël Giraud a également rappelé la nécessité de renforcer les pouvoirs du régulateur, l’ARAF.
Le Gouvernement s’est montré plutôt réservé sur ce renforcement de l’ARAF mais plusieurs amendements importants ont tout de même étaient adoptés avec le concours du rapporteur.
Le ministre s’est montré plus décidé à défendre une ligne protectrice pour permettre à la SNCF d’être en mesure de résister à la DB avec des dispositifs s’inspirant du modèle allemand et pour soutenir une filière ferroviaire française dont l’avenir est parallèlement en discussion avec le dossier Alstom examiné par la commission des affaires économiques.
Avant 2013, une des questions essentielle restait celle de la possibilité de la formation d’une holding.
En effet, lors de la première lecture du quatrième paquet ferroviaire au Parlement européen, l’alliance franco-allemande a légitimé ce projet a priori en confrontation directe avec les dogmes économiques traditionnels sur la concurrence défendus par la Commission Européenne.
Cette alliance a entériné cette possibilité de holding reprise dans le projet de loi, encadrée par un certain nombre de garde-fous.
Afin que l’opérateur historique SNCF ne bloque pas le marché et pour que la concurrence soit équitable, Joël Giraud a réclamé la nécessité d’un régulateur fort et fait adopté ou participé à l’adoption de plusieurs amendements significatifs.
Ces amendements défendus par Joël Giraud portaient notamment sur la procédure de sanction, sur la composition du Collège de l’ARAF, sur l’obligation d’un avis conforme de l’ARAF pour la tarification des infrastructures de services, des gares et l’utilisation des services de la Suge, sur l’habilitation pour prendre des mesures de sa propre initiative pour corriger des discriminations à l’égard des opérateurs ou les distorsions de concurrence, ou encore sur la suppression d’un rapporteur public nommé par le Gouvernement.
Sur le sujet du renforcement du Régulateur, ces amendements ont été adoptés avec le soutien du rapporteur Gilles Savary, du groupe SRC (PS) mais aussi parfois de l’UDI et de l’UMP.
Les députés UMP ont affirmé qu’il faut séparer à nouveau le système ferroviaire en deux et pensent qu’ils seront dans l’obligation de le faire lorsqu’ils reviendront au pouvoir.
Ces amendements permettent à Gares & Connexions de rester dans le giron de SNCF Mobilités, contrairement à ce que demandent tous les acteurs du système ferroviaire à l’exception du monde cheminot.
Mais il est probable qu’il ne s’agit sans doute que d’un sursis de deux ans, délai accordé avant la revoyure.
Cependant, le renforcement de l’Araf reste toutefois limité. En dépit des amendements proposant sa suppression et après un long débat, un commissaire du gouvernement y sera nommé, ce qui ne manque pas de nourrir des soupçons même si le commissaire ne prendra pas part aux délibérations.
Autre limite : à côté du haut comité du ferroviaire sera institué un comité des opérateurs du réseau qui tentera de trouver des compromis au quotidien, avant de recourir en cas de besoin au régulateur.
Au final, l’Araf a donc tout de même retrouvé son pouvoir de sanction et voit le champ de ses avis conformes étendu.
Des deux côtés de l’échiquier politique, l’UMP et le PC (par la voix d’André Chassaigne) sont d’accord sur un point, le texte prépare la séparation entre SNCF Réseau et SNCF Mobilités et n’est qu’une étape avant la suppression de l’Epic de tête. L’UMP l’approuve et le PC le regrette et le dénonce.
Si on se base sur les positions défendues et les propos énoncés par Bertrand Pancher, député porte-parole de l’UDI, les centristes devraient s’abstenir.
Sensible aux « avancées » du texte, le député UDI juge positifs la définition d’une stratégie ferroviaire, le regroupement de l’infrastructure, qu’il pense de nature à s’engager dans un réel plan d’économies et de productivité, et le fait qu’il y a « plutôt » un renforcement des pouvoirs de l’Araf.
Cependant, pour l’UDI, le texte ne serait pas à la hauteur des enjeux et il reste
en surplomb les « atermoiements sur la taxe poids lourd » et la « timidité française » au regard de ce qu’a fait la DB il y a vingt ans : rachat de la dette, ouverture à la concurrence, changement du statut social.
Au sujet de volet social, il est frappant de constater que l’amendement adopté le plus significatif sur le sujet a été proposé par Joel Giraud, il vise à permettre la mobilité des salariés entre les trois EPIC, même si elle sera encadrée pour les postes sensibles ou les salariés ont accès à des informations confidentielles. Il a ainsi défendu avec succès la principale disposition relative à l’unicité des salariés du groupe SNCF.