Les députés ont adopté, à la demande du gouvernement, plusieurs amendements qui ont « pour objet de diminuer le coût global » du CIDD (crédit d'impôt en faveur du développement durable) de « 20 % », mardi 15 novembre 2011, dans le cadre de l'examen en séance publique du PLF (projet de loi de finances) 2012. Cette mesure fait partie des mesures du plan « d'équilibre des finances publiques » qui avaient été annoncées par le Premier ministre, le 7 novembre dernier (L'AEDD n°11949). L'opposition, par les voix de Jean-Paul Chanteguet (PS, Indre) et François de Rugy (EELV, Loire-Atlantique), a critiqué cette mesure. Le premier a rappelé « les engagements » de la France dans le domaine environnemental, notamment « le paquet énergie-climat » qui prévoit l'objectif 3x20 (à l'horizon 2020, réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, atteinte de 20 % d'énergies renouvelables et hausse de 20 % de l'efficacité énergétique). Le second évoque, non un coup de rabot, mais « un coup de hache ». « Une fois de plus, le gouvernement et sa majorité ont la main lourde » s'agissant de l'environnement. « Les Français sont prêts à être des acteurs du développement durable. Vous leur enlevez leurs quelques rares moyens d'action. » HAUSSE DU PLAFOND DU CRÉDIT D'IMPÔT PPRT Par ailleurs, les députés ont adopté un amendement proposé par la commission des finances et soutenu par le gouvernement qui relève le plafond du crédit d'impôt pour les travaux des particuliers concernés par un PPRT (plan de prévention des risques technologiques). Lors de l'examen de la loi Grenelle II, le Parlement avait rehaussé le crédit d'impôt à hauteur de 40 % des frais engagés. Puis, un coup de rabot en loi de finances 2011 l'a abaissé à 30 %, le gouvernement considérant qu'il s'agissait d'une niche fiscale (L'AEDD n°8627). Avec l'amendement adopté par les députés dans le PLF 2012, le taux reste à 30 %, mais le plafond est doublé et porté à 20 000 euros pour un couple. « Cette mesure devrait permettre de couvrir 95 % des situations », assure Jacques Pélissard (UMP, Jura), auteur de l'amendement. « Le coût global de ces travaux a été évalué à 200 millions d'euros (y compris les travaux supérieurs au plafond). Étalés sur plus de dix ans, le coût annuel des travaux éligibles (inférieur au plafond) ne devrait pas dépasser quinze millions d'euros. Le coût généré par le relèvement du plafond à 20 000 euros serait de quelques centaines de milliers d'euros dans le cadre d'une dépense fiscale au maximum de l'ordre de 4,5 millions d'euros par an. » « Afin de gager cette dépense fiscale supplémentaire, il est parallèlement proposé de ne plus accorder le crédit d'impôt au titre des dépenses d'acquisition, dans un immeuble collectif, d'ascenseurs électriques à traction possédant un contrôle avec variation de fréquence », précise l'exposé des motifs de l'amendement. Peu avant l'adoption de cet amendement, plusieurs députés, dont les élus UMP Bertrand Pancher (Meuse), Valérie Boyer (Bouches-du-Rhône) et Michel Bouvard (Savoie), avaient plaidé en vain pour que les riverains de sites Seveso devant réaliser des travaux chez eux puissent bénéficier d'un prêt à taux zéro. « Nous sommes sur une problématique très importante. Pourquoi? En dépend l'acceptabilité par les populations de la présence d'établissements industriels dits à risque. Nous ne pourrons pas développer de discours sur la désindustrialisation dans notre pays si nous ne nous donnons pas les moyens de les rendre acceptables », déclare Michel Bouvard. « Les prêts à taux zéro sont des niches », rétorque Valérie Pécresse, ministre du Budget. Philippe Tourtelier (PS, Ille-et-Vilaine) estime pour sa part que selon « le principe pollueur-payeur », les ménages « ne devraient rien payer ». « Ils sont pris en otage. » Avec un crédit d'impôt aussi bas, « les préfets ne vont pas aller jusqu'au bout de la démarche et imposer les travaux compte tenu de l'impact ». Valérie Boyer note pour sa part qu'il manque un « outil juridique pour que les collectivités participent à ces travaux » : « Aujourd'hui, nous n'avons pas l'outil pour inciter les collectivités aux travaux. Pire, quand elles le veulent, elles ne peuvent pas le faire. » Valérie Pécresse s'engage à « prolonger la réflexion pour que, dans le cadre du principe pollueur-payeur, nous retravaillons sur le financement que nous pourrons demander aux entreprises ». Elle ajoute ne pas être « certaine qu'on puisse le faire d'ici le PLFR [projet de loi de finances rectificative] ». TEOM INCITATIVE Par ailleurs, Bertrand Pancher fait adopter un ">amendement créant « la base législative dans le code général des impôts de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative », dite Teom incitative, à l'article 47 septies. « Validé par les grandes fédérations d'élus locaux, soutenu par Amorce, ce dispositif renforcera l'autonomie des collectivités locales, qui auront le choix entre la Reom, la Teom classique et la Teom avec une part incitative. Il contribuera à inciter au tri des déchets ménagers et donc à réduire le volume des déchets ultimes qui est l'un des objectifs chiffrés de la loi 'Grenelle II' », se félicite le député, précédemment rapporteur du volet déchets de cette loi. Un sous-amendement à l'amendement, présenté par le socialiste François Brottes (Isère) et adopté par l'Assemblée nationale, prévoit qu' « à titre transitoire et pendant une durée de cinq ans maximum, la part incitative peut être calculée proportionnellement au nombre de personnes composant le foyer ». « Il faut mettre en place un outil. Cependant, aussi intéressante que soit la démarche de Bertrand Pancher, elle ne me paraît pas suffisamment aboutie aujourd'hui : aucune expérimentation n'a été menée et il faut encore déterminer précisément les modalités de calcul d'une taxe véritablement incitative. Il serait un peu précipité de voter cet amendement », réagit Jacques Pélissard, en tant que président de l'Association des maires de France. « Nous ne souhaitons pas passer de la Teom traditionnelle à la Teom incitative. Il s'agit d'abord d'offrir une option. Cela revêt donc évidemment un caractère expérimental », répond Bertrand Pancher. Ce dernier se voit refuser un amendement visant à « instaurer la taxe sur les produits fortement générateurs de déchets prévue par l'article 46 de la loi Grenelle I ». « La responsabilité du législateur, en matière de fiscalité, est de fixer l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement. L'amendement n'étant pas rédigé de façon assez précise, il n'est pas opérant », justifie le rapporteur général Gilles Carrez (UMP, Val-de-Marne). Quant à Jean-Paul Chanteguet (PS, Indre), il n'obtient pas l' « ultime élargissement du champ de l'éco-contribution applicable à la filière des imprimés et papiers graphiques, à l'ensemble des publications de presse et aux livres ». TAXE POIDS LOURDS Les députés UMP Pierre Méhaignerie (Ille-et-Vilaine) et Marc Le Fur (Côtes-d'Armor) font adopter une minoration de la taxe poids lourds de 40 % (au lieu de 25 %) pour les régions périphériques que sont la Bretagne, l'Aquitaine et Midi-Pyrénées, comme annoncé par le ministère des Transports à AEDD (L'AEDD n°11859). Le président de la commission des finances, le socialiste Jérôme Cahuzac (Lot-et-Garonne), réagit : « Nous avons tout à l'heure entendu le rapporteur général, applaudi par la plupart de nos collègues, et notamment par ses amis de l'UMP, prononcer un vibrant plaidoyer en faveur de la protection de la ressource fiscale. Si, dans sa sagesse, l'Assemblée nationale décide d'adopter cet amendement avant même qu'une taxe n'entre en vigueur, c'est, je le constate, parce que vous avez déjà décidé de l'alléger. » Jean-Paul Chanteguet (PS, Indre) ajoute : « Nous sommes en train de vider le texte de toute sa substance. » VERSEMENT TRANSPORT ET SACS PLASTIQUE Joël Giraud (apparenté socialiste, Hautes-Alpes) obtient, malgré le désaccord de la commission et du gouvernement, la possibilité d'instaurer un versement transport pour les communes touristiques de moins de 10 000 habitants, en application de la loi Grenelle I. Le taux est fixé « dans la limite de 0,55 % des salaires ». En revanche, Charles de Courson (NC, Marne) ne réussit pas à faire adopter un amendement prévoyant une taxe pour les sacs pour fruits et légumes, et ce, malgré le soutien de la commission des finances. La mesure n'aurait pris « effet que dans un peu plus de deux ans, afin de laisser aux industriels et aux distributeurs le temps de s'adapter », a plaidé en vain le député centriste. « Le but de cette taxe n'est pas qu'elle soit perçue : c'est de provoquer une mutation et de faire en sorte que les sacs plastique non biodégradables pour fruits et légumes disparaissent. » Mais pour Valérie Pécresse, « cette taxe s'élève à dix euros le kilo de sacs plastiques. Aujourd'hui, vous voulez la porter à quinze euros le kilo. Ce taux me semble excessivement élevé pour un objectif déjà largement atteint et dont nous continuerons à nous approcher, puisque, d'ici à 2014, la menace de la taxe à dix euros le kilo reste effective ».
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