La mise en place du système français d’écotaxe était viciée dès l'élaboration du cahier des charges de l'appel d'offres (et sans même porter de jugement sur le caractère pour le moins étonnant de la procédure qui a conduit au choix d'Ecomouv).
En effet, le réseau routier proposé comme base de taxation ne reposait sur aucune logique d'itinéraire mais un simple classement administratif. Et il exonérait les réseaux autoroutiers au motif qu'ils sont sous concession et que l'UE s'y opposerait.
Dans tous les pays d'Europe appliquant une écotaxe, la logique de tarification est la suivante :
- le réseau autoroutier (incluant le réseau autoroutier à gabarit routier, à l'image des autoroutes de montagnes suisses ou autrichiennes) est taxé, y compris lorsqu'il est sous quasi-concession (cas de l'Autriche dont le système n'a soulevé aucune remarque de l'UE) ainsi que le réseau national structurant ("Schnellstraβen") ;
- la taxation est maximale pour les PL à itinéraire international (passant une frontière, voire deux frontières - cas des PL traversant un pays-) ;
- il y a rétablissement d'une équité avec les PL nationaux quant aux taxes nationales non prises en compte pour les PL étrangers (introduction de la taxe à l'essieu dans l'écotaxe en Suisse/Autriche) ;
- il est établi un malus écologique avec une taxe différenciée suivant le niveau de pollution du camion.
La forme de la collecte est différente suivant les pays (vignette ou portiques d'itinéraires), la plus élaborée étant le système autrichien mis en place par Autostrade per l'Italia qui cumule itinéraire, pollution et taxe à l'essieu. Notons au passage que dans ce pays un PL sur autoroute s’acquitte d’une taxe 2 fois supérieure au km que le péage autoroutier en France.
En pièce jointe n° 1, nous proposons une analyse détaillée du très efficace système autrichien qui se rapproche le plus du dispositif français mais relève de la logique précitée.
La carte du massif alpin français, en pièce jointe n ° 2, démontre à elle seule l'inadéquation du système proposé dans le cahier des charges. Alors que les populations de ces zones sont favorables à l'écotaxe (comme tous les secteurs frontaliers envahis par les PL) et que le trafic Est / Ouest est celui qui, depuis 10 ans, connaît la plus forte progression en matière de transit international, le passage des frontières suisses et italiennes est libre et seules deux routes sont taxées.
- la RN90 d'Albertville à Moutiers (sans doute pour pénaliser les livraisons de marchandises dans les stations);
- la RN85 de Gap à Grenoble (qui n'est empruntée que par quelques marchands de pommes allant vendre à Grenoble et des entreprises de transport du plateau matheysin qui ont résisté de justesse à la fermeture du bassin minier !).
Autrement dit dans les Alpes comme ailleurs, seuls les transporteurs locaux à courte distance paieraient l'écotaxe. En revanche, l’on pourrait faire Turin-Barcelone via les Alpes par autoroute ou route nationale sans payer l’écotaxe !
C'est la raison pour laquelle le groupe RRDP demande :
- soit de modifier le contrat Ecomouv en mettant en place le même système que celui qu’Autostrade per l'Italia a élaboré pour l'Autriche, ce qui éviterait tout paiement de dédit à Ecomouv mais impose en France une convention avec les sociétés concessionnaires d'autoroutes pour percevoir l'écotaxe PL pour le compte de l'État ;
La perception par les sociétés d’autoroutes d’une écotaxe poids lourds n’est pas considérée comme une rupture d’équilibre de la concession si les itinéraires routiers de substitution sont taxés dans les mêmes conditions. C’est le système appliqué dans les pays germaniques et en Suisse. Pour donner un exemple, si ce système est mis en place sur l’A43 à la sortie du tunnel du Fréjus (frontière italienne), il doit l’être également pour la RN6 qui lui est parallèle et l’itinéraire de substitution du col du Montgenèvre (RN94).
- soit la mise en place d'une vignette à l'entrée du territoire national différenciée suivant le niveau de pollution, le nombre d'essieux et une vignette entrée/sortie pour les PL traversant le territoire, ce système imposant un dédommagement à Ecomouv.
En tout état de cause, l'écotaxe PL doit concerner, comme la LKW Maut germanique, tout le réseau autoroutier et routier principal (y compris les départementales à classement et nomenclature européenne) et privilégier la taxation des PL à itinéraire international.
Téléchargement PJ1-analyse-autriche-JG060514
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