Vous avez été nombreux à faire part de vos préoccupations à votre député, Joël Giraud, concernant le projet de loi sur « la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs » et plus particulièrement sur les dispositions relatives aux mineurs.
Veuillez trouver ci-dessous la réponse de M. Joël Giraud à cette pétition :
Téléchargement Réponse type justice des mineurs 230611
Madame, Monsieur,
Vous avez souhaité, dans votre courriel, me faire part de vos préoccupations concernant le projet de loi sur « la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs » et plus particulièrement sur les dispositions relatives aux mineurs. Je vous remercie d’avoir attiré mon attention à ce sujet et je tiens à vous exprimer mon attachement à la spécificité de la justice des mineurs.
Alors même qu'un code des mineurs est supposé être en préparation, ce projet de loi entend réviser la justice des mineurs. C'est à dire modifier, pour la trente cinquième fois, l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante dont la pierre angulaire est que l'éducatif doit primer sur le répressif, avant tout jugement. Soit l'exact contraire de l'ambition et de la politique du gouvernement.
Je comprends et partage, par conséquent, vos inquiétudes quant aux propositions qui sont faites par le gouvernement en matière de justice des mineurs et comme vous je considère que les mineurs ne peuvent pas être jugés comme les majeurs.
C’est un principe qui est non seulement strictement encadré constitutionnellement mais qui découle aussi des textes internationaux ratifiés par la France.
La spécificité de la justice des mineurs est une exigence constitutionnelle selon laquelle doivent être reconnus l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l'âge et la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur responsabilité. Ce que défend également la Convention internationale des droits de l'enfant.
Ce que n’a pas manqué d’ailleurs de réaffirmer le Conseil Constitutionnel le 11 mars dernier.
Malgré cela, dans le deuxième volet du texte, le gouvernement tente une nouvelle fois d’aligner la justice des enfants, fondée sur des juridictions spécialisées, des procédures spécifiques et un but éducatif, sur celle des adultes. Cette réforme, contraire aux droits fondamentaux de l’enfant, ne saurait masquer l’échec de la politique du gouvernement en matière de délinquance des mineurs.
Juger les mineurs délinquants comme des adultes, c’est l’idée fixe de la droite qui, réforme après réforme, déshabille l’ordonnance de 1945 sur la protection de l’enfance.
Après avoir voulu appliquer aux enfants les peines « planchers » en matière de récidive et tenté de permettre au parquet de poursuivre un mineur devant le tribunal pour enfants selon la procédure de citation directe, sans instruction préparatoire par le juge des enfants, le gouvernement revient une nouvelle fois à la charge en proposant que les mineurs de plus de 16 ans soient jugés par une majorité de juges non spécialisées. Manière déguisée d’abaisser la majorité pénale et de juger les adolescents comme des adultes.
Pourtant la justice des mineurs est efficace : 80 % des enfants qui y sont confrontés ne récidivent pas. C’est d’ailleurs un excellent instrument de prévention de la délinquance, si on lui donne les moyens de remplir ses missions. L’ordonnance de 1945 est admirée et copiée dans la plupart des démocraties. L’Allemagne et l’Espagne en ont repris les principes. D’autres comme la Suède sont allés plus loin, en appliquant le droit des mineurs jusqu’à 21 ans.
Or, en portant gravement atteinte à la spécificité éducative de la justice des mineurs, cette réforme discrédite nos principes républicains.
Le plus grave est que cette politique d’alignement des enfants sur les adultes n’a porté aucun fruit. La délinquance des mineurs continue de progresser. Preuve que le piétinement des droits fondamentaux ne fait pas reculer l’insécurité...
La France doit rester du bon côté et ne pas accepter « un pas de plus vers le démantèlement de l’ordonnance de 1945 » qui susciterait désolation et incompréhension dans les pays voisins.
Aussi, les députés PRG auquel j’appartiens s’opposent à l’ensemble de cette réforme et dénoncent cette atteinte à la spécificité de la justice des mineurs. Nous considérons, en effet, que la spécificité de la justice des mineurs doit être maintenue. Traiter de manière indifférenciée un jeune délinquant et un adulte ne peut qu'aboutir qu’à sa stigmatisation et poser de graves problèmes d’intégration future pour le jeune.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé, tout comme les sénateurs radicaux de gauche, des amendements visant à en supprimer les grandes lignes et nous nous sommes opposés à l'adoption de ce projet de loi lors de son examen à l’Assemblée nationale mercredi 22 juin.
Je tiens à réaffirmer notre attachement à ce principe et à la nécessité d’une législation et d’une juridiction spécialisée.
J’espère que tous ces éléments vous permettront de mieux cerner ma position à ce sujet et répondront à vos préoccupations légitimes.
Je reste à votre disposition pour toute autre intervention que vous jugerez nécessaire et je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, mes sincères salutations.
Joël GIRAUD
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