Question publiée au JO le : 19/03/2013 page : 2994
M. Joël Giraud appelle l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur la fin prochaine de la trêve des expulsions locatives. Cette échéance peut générer des conséquences dramatiques sur la vie quotidienne de nos concitoyens Les effets de la crise économique et sociale que nous traversons touchent de plein fouet les plus fragiles. L'augmentation de la pauvreté, du chômage, des emplois précaires, des loyers et des charges liées au logement a comme corollaire une augmentation des impayés de loyers. En 10 ans, le nombre de décisions judiciaires d'expulsion pour impayés de loyers a augmenté de 40 % et le nombre d'expulsions avec le concours de la force publique a doublé.
En 2011, 113 669 décisions judiciaires d'expulsion pour impayés de loyers ont été rendues (+ 4 % sur un an), et 12 760 expulsions ont eu lieu avec le concours de la force publique (+ 9 % sur un an), selon les ministères de la justice et de l'intérieur. En réalité, de nombreuses familles quittent d'elles-mêmes leur logement avant l'intervention des forces de l'ordre. La mise en oeuvre du concours de la force publique, beaucoup plus systématique, traduit un durcissement très préoccupant du traitement de ces situations de fragilité, alors que ces décisions provoquent des drames humains inacceptables : éclatement de la famille, déscolarisation des enfants, risque de perte d'emploi, ruptures avec les attaches du quartier, détérioration de l'accès à la santé. Alors même que le dispositif d'hébergement est saturé et inadapté, les personnes menacées d'expulsion viendront demain grossir encore les rangs des personnes à la rue et sollicitant le 115.
Les expulsions locatives représentent également un coût financier très important (instruction juridique, huissiers, concours de la force publique, sollicitation du 115 et des dispositifs d'hébergement, nuitées d'hôtels, rupture du parcours d'insertion à réamorcer, etc.). La circulaire du 26 octobre 2012 protège des expulsions locatives les personnes dont le relogement a été reconnu prioritaire et urgent par la mise en oeuvre du droit au logement opposable (DALO).
Certaines commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) en ont toutefois eu une lecture restrictive et envisagent de ne l'appliquer que pour des ménages reconnus prioritaires au motif d'une menace d'expulsion. Qu'en est-il du sort des autres ménages, eux aussi menacés d'expulsion, qui n'ont pas encore déposé de recours ou reçu une réponse à ce dernier ? Dans le plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, les dispositifs de prévention et d'accompagnement des ménages en procédure d'expulsion locative sont peu évoqués. Certes, des chantiers sont en cours mais en attendant qu'ils aboutissent, il apparait indispensable de décréter, pour l'année 2013, un moratoire sur toutes les expulsions locatives sans solution avec dédommagement des propriétaires sur le fonds d'indemnisation qui permet aux préfets d'indemniser les propriétaires lorsqu'ils décident de ne pas procéder à l'expulsion). Sans vouloir mettre en difficulté les propriétaires ni donner un aval
à d'éventuels mauvais payeurs, ce moratoire pour l'année 2013 permettrait de trouver des solutions dignes et opérantes et d'éviter des conséquences dramatiques pour les plus fragiles de notre pays. Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître la position du Gouvernement sur la mise en place en 2013 d'un moratoire sur toutes les expulsions locatives sans solution, avec dédommagement des propriétaires.