Ma question orale:
M. le président. La parole est à M. Joël Giraud, pour exposer sa question,n° 134, relative au désenclavement des Hautes-Alpes.
M. Joël GIRAUD. Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, il y a dix ans, la DATAR, devenue depuis la DIACT, effectuait un diagnostic de l'accessibilité des départements français, constatant qu'un seul en France - celui des Hautes-Alpes - se trouvait totalement inaccessible, que ce soit sur le plan autoroutier, aérien ou ferroviaire.
Où en sommes-nous en 2008 ? Sur le plan routier, l'axe Marseille-Turin, via le col du Montgenèvre, a certes été amélioré, mais il impose toujours de traverser Gap ou d'emprunter une route départementale sinueuse pour accéder de l'autoroute A 51 à la nationale 94 vers l'Italie. De plus, le futur plan de modernisation des itinéraires - le PDMI - exclut le dernier ouvrage nécessaire à la sécurité des riverains : la déviation du village de La Roche-de-Rame où deux voitures se croisent déjà avec difficulté et où un poids lourd sur cette route surfréquentée par les camions ne peut même plus croiser un vélo. Cette situation est d'autant plus incompréhensible que les études relatives à cette déviation s'achèvent dans le cadre de l'ancien contrat de plan État-région. Où sont donc les cohérences entre l'ancien CPER et l'actuel PDMI sur le réseau qui est toujours resté réseau national ?
Sur le plan autoroutier voilà des dizaines d'années que le serpent de mer - qui est d'ailleurs plutôt d'ailleurs un serpent de terre - de l'achèvement de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron hante nos vallées. Pendant ce temps, la situation s'est considérablement dégradée sur la RN 85 Gap-Grenoble, qui n'a bénéficié d'aucun investissement depuis des années. Son raccordement à la fin toujours provisoire de l'A 51 nécessite toujours la traversée de Gap, le choix du tracé par l'est de Gap ayant été fait à grand renfort d'annonces très politiques. Pour autant, au-delà de l'impact environnemental de cet itinéraire, demeure un problème qui, lui, a toujours été largement contourné : comment financer une autoroute de 2,2 milliards d'euros quand les concessionnaires potentiels annoncent ne pouvoir aller au-delà de 15 % de financement, laissant près de 2 milliards d'euros à la charge des collectivités publiques et de l'État ?
Sans attendre le Grenelle de l'environnement, le comité de massif des Alpes, qui rassemble tous les acteurs politiques et socioprofessionnels du massif, a proposé, dès le 26 septembre 2005, une sortie de crise. Je vous rappelle les propositions de l'époque. Ce comité prônait alors une concession autoroutière à gabarit routier sur trente kilomètres, comme cela existe sur l'autoroute de la Maurienne entre Saint-Michel-de-Maurienne et le tunnel du Fréjus, afin de trouver sur ce tronçon de l'A 51 - le contournement de Gap par le sud -, qui est le plus solvable, une solution respectueuse de l'environnement et garante des finances publiques. S'agissant de la liaison Grenoble-Gap, le comité de massif proposait tout simplement, dans l'attente de la construction de la fameuse A 51, un plan de modernisation de l'itinéraire - et dont on ne savait pas, à l'époque, qu'il serait ainsi nommé - permettant de fixer un objectif de service pour relier Gap à Grenoble en une heure quinze. Ces solutions réalistes ne génèrent, de plus, aucun effet d'aspirateur sur le trafic des poids lourds et respectent parfaitement l'environnement. Pourquoi attendre encore pour les mettre en ouvre ?
Quant au réseau ferroviaire, nous en avons souvent discuté, la situation des marchandises, comme des voyageurs, est devenue critique. De commission intergouvernementale en commission intergouvernementale, nous n'en finissons plus de trouver un énième accord, jamais respecté, avec nos voisins italiens pour revenir en dessous du seuil, jugé dangereux par l'État lui-même, de 100 poids lourds de plus de vingt-six tonnes par an au col de Montgenèvre.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Joël GIRAUD. La situation sur cet axe est amenée à s'amplifier : les échanges est-ouest sont en hausse et les échanges nord-sud en baisse. Cette tendance s'accentuera encore avec l'ouverture récente du tunnel du Lötschberg, puis avec celle du Saint-Gothard en 2013 et du Brenner en 2020.
La situation est toujours extrêmement difficile pour les voyageurs, puisque le point de raccordement de Valence-Ville pour les stations des Alpes du Sud est amené à ne plus avoir de desserte en raison de l'ouverture d'une future gare TGV à Allan dans la banlieue de Montélimar.
M. le président. Je sais qu'il vous faut beaucoup de temps pour désenclaver le département, mais vous avez dépassé votre temps de parole.
M. Joël GIRAUD. Cela fait dix ans que nous attendons, monsieur le président !
Sans attendre le Grenelle de l'environnement, le comité de massif des Alpes a proposé une autre sortie de crise consistant à ce que le débat public relatif au tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre soit mené sans délai et avant 2009 et que vous usiez de votre influence, lors de la présidence française de l'Union européenne, pour que cet axe soit intégré au RTE-T.
Sur ces trois questions - l'inscription de la déviation de La Roche-de-Rame au PDMI, la mise en ouvre du projet mixte autoroutier et routier Grenoble-Sisteron par Gap, conforme au vote du comité de massif et compatible avec le Grenelle de l'environnement, et le lancement du débat public sur le tunnel ferroviaire sous le Montgenèvre -, les Alpes du Sud attendent vos réponses et les apprécieront d'autant plus qu'elles seront précises.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Vous avez deux minutes pour désenclaver les Hautes-Alpes, monsieur le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.* Ce sera difficile en deux minutes, parce que M. Giraud a rappelé que des dizaines années de travail ont déjà été nécessaires. Il se bat d'ailleurs beaucoup sur ce sujet. Au reste, nous nous rencontrerons sur le terrain, après les élections du printemps.
La route nationale 94 a déjà fait l'objet d'aménagements importants avec notamment, au titre du contrat de plan État -région 2000-2006, la mise en service de la déviation de Montgenèvre en novembre 2005 et celle de la déviation d'Embrun en décembre 2007.
Le projet de déviation de la Roche-de-Rame, déclaré d'utilité publique en novembre 1999, a fait l'objet d'études complémentaires afin d'analyser plus finement les contraintes du site et de confirmer la faisabilité de la solution retenue, conformément aux demandes exprimées lors de l'enquête publique. Ainsi, les études relatives au déplacement de la voie ferrée nécessaire à ce projet de déviation routière ont évalué le coût de ces travaux ferroviaires à 30 millions d'euros. De même, ce déplacement induit des travaux importants dans le lit mineur de la Durance qui est à présent intégré au réseau Natura 2000.
Compte tenu de la complexité de cette déviation en termes technique, financier et environnemental, une solution d'aménagement sur place de l'axe existant a été envisagée. La recherche d'un minimum de consensus sur cette solution est un préalable à son inscription éventuelle aux programmes de développement et de modernisation des itinéraires - PDMI - qui prendront le relais des volets routiers des contrats de plan État-région. Je suis sur ce point à votre écoute, monsieur Giraud.
Nous devons de nouveau traiter toutes les infrastructures à l'aune du Grenelle de l'environnement. Nous avons décidé qu'il n'y aurait pas de routes ou autoroutes nouvelles sauf pour résoudre des problèmes de congestion, de sécurité, d'intérêts locaux et d'aménagement du territoire.
La réflexion nationale va se poursuivre et concernera évidemment les infrastructures routières pour lesquelles une nouvelle politique de développement sera définie. Des comités opérationnels ont été mis en place pour décliner de façon opérationnelle ces orientations. Le serpent de mer va, bien sûr, revenir. Ainsi, les projets routiers les plus importants, dont l'autoroute A 51 entre Grenoble et Sisteron fait partie, seront réévalués. Il en sera de même des projets ferroviaires.
Le département des Hautes-Alpes pose des problèmes très compliqués quant à son infrastructure. Je vous propose donc de laisser passer cette période d'élections municipales et cantonales. Vous serez encore là - moi aussi peut-être. Je me rendrai alors dans votre département pour vous rencontrer ainsi que vos collègues. Les difficultés que je rencontrerai pour me rendre sur place me conforteront dans la nécessité d'être à vos côtés un des acteurs du désenclavement.
M. Joël GIRAUD. J'aimerais répondre à M. le secrétaire d'État, monsieur le président.
M. le président. Mais votre temps de parole est écoulé, mon cher collègue !
M. Joël GIRAUD. Ce serait pour le remercier !
M. le président. Vous avez donc la parole.
M. Joël GIRAUD. Je tenais à remercier M. le secrétaire d'État de sa proposition de se rendre sur place. Il sera parfaitement bien accueilli.
Je tenais toutefois à lui préciser que ses services ont dû se tromper quant à la déviation de La Roche-de-Rame, car l'ancien projet, consistant à passer dans le lit de la Durance, a été abandonné depuis longtemps.
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